
Loi 887, Loi 1.235, cadre opérationnel et impact patrimonial
Lignes Directrices
Le secteur libéralisé - Régime de la Loi n° 887 du 25 juin 1970
Relèvent du régime dit « sous Loi 887 » les appartements soumis à la Loi n° 887 du 25 juin 1970, portant limitation du champ d’application de l’ordonnance-loi n° 669 du 17 septembre 1959 relative aux conditions de location des locaux à usage d’habitation.
Les immeubles concernés présentent généralement les caractéristiques suivantes :
- immeubles anciens construits avant le 1er septembre 1947,
- propriété de personnes privées,
- logements non réservés exclusivement aux Monégasques, mais soumis à un encadrement des loyers et des conditions de relocation.
Conditions d’accès au logement
La location n’est autorisée qu’au bénéfice des personnes répondant à l’un des critères suivants :
- ascendants ou descendants du propriétaire ou de son conjoint, ainsi que leurs conjoints,
- personnes de nationalité monégasque,personnes domiciliées à Monaco depuis au moins cinq ans et y exerçant une activité professionnelle depuis plus de six mois,
- personnes travaillant à Monaco depuis au moins cinq ans.
Les conditions de location doivent obligatoirement être visées par la Direction de l’Habitat.
Classement administratif des logements
Les logements sont classés selon trois catégories :
- Catégorie A : réservée aux Monégasques et assimilés
Personnes de nationalité monégasque ou titulaires d’un lien étroit avec la Principauté.
- Catégorie B : enfants du pays et résidents établis
Personnes nées à Monaco ou y résidant depuis de nombreuses années avec attaches économiques stables.
- Catégorie C : libre sous conditions
Ouverte aux résidents justifiant d’un séjour régulier et d’une activité professionnelle à Monaco, tout en conservant un encadrement des loyers et des renouvellements.
Un régime dérogatoire s’applique aux locaux des catégories 1 et 2 A-B devenus vacants après le 1er octobre 1970.
Fonctionnement du bail
Le bail est conclu pour une durée de six ans, avec possibilité de résiliation annuelle à la seule initiative du locataire.
Dans ce cadre dérogatoire :
- il n’existe pas de protection du loyer,
- le propriétaire peut fixer librement le montant,
- une clause d’indexation basée sur l’indice en vigueur à Monaco peut être intégrée.
Toute relocation doit faire l’objet d’une déclaration obligatoire auprès de la Direction de l’Habitat.
Les motifs de résiliation sont strictement limités :
reprise pour habitation personnelle, reconstruction, non-paiement des loyers, etc.
Certains immeubles peuvent également faire l’objet d’un déclassement administratif en cas de démolition-reconstruction autorisée.
Portée pratique et implication pour l’investisseur
Ce régime concerne potentiellement l’ensemble des résidents occupant des logements anciens, sans distinction de nationalité, mais il vise prioritairement la protection des Monégasques et des « enfants du pays », tout en offrant aux résidents étrangers stables une certaine sécurité locative.
Sur le plan patrimonial, un bien soumis à la loi 887 ne constitue pas un frein réel à l’investissement locatif, les loyers pouvant être librement fixés dans le cadre dérogatoire, la demande restant structurellement supérieure à l’offre.
Il reste néanmoins indispensable de vérifier systématiquement le régime applicable auprès de la Direction de l’Habitat.
Le secteur protégé - Régime de la Loi n° 1.235 du 28 décembre 2000
Le secteur protégé concerne les immeubles construits avant 1947, dont l’affectation vise prioritairement le logement des Monégasques et des « enfants du pays ».
Il est régi par la Loi n° 1.235 du 28 décembre 2000, modifiée notamment par la loi n° 1.291, relative aux conditions de location de certains locaux d’habitation construits ou achevés avant le 1er septembre 1947.
Les conditions de location sont obligatoirement visées par la Direction de l’Habitat.
Les logements ne peuvent être attribués qu’à des personnes inscrites comme personnes protégées, sous conditions strictes de résidence et de ressources.
Finalité du dispositif
Cette loi poursuit trois objectifs structurants :
- assurer un parc de logements réservé à la population monégasque,
- encadrer strictement les loyers, la durée des baux et les bénéficiaires,
- préserver l’équilibre social dans un territoire marqué par une rareté foncière extrême.
Plusieurs ajustements législatifs successifs ont renforcé ce cadre, en précisant :
- le champ des biens concernés,
- les critères d’éligibilité,
- les obligations des propriétaires privés.
Critères de classement dans le régime 1.235
L’affectation d’un bien repose notamment sur :
- la date de construction,
- la nature des droits de l’État sur le bien,
- l’affectation administrative décidée par la Direction de l’Habitat,
- le statut juridique du propriétaire,la typologie du logement.
Les trois grandes catégories administratives
1. Immeubles domaniaux
Propriété de l’État monégasque, gérés par la Direction de l’Habitat, réservés exclusivement aux Monégasques, selon un classement de priorité.
2. Immeubles privés soumis à la loi 1.235
Biens classés par arrêté ministériel. Loyers et conditions de location contrôlés. Location exclusivement au profit des Monégasques ou de leurs ayants droit.
3. Immeubles conventionnés ou mixtes
Bâtiments partiellement affectés au régime 1.235, souvent issus de conventions entre l’État et des promoteurs privés.
L’administration tient à jour la liste officielle des logements soumis à ce régime.
Ordre de priorité des bénéficiaires
Depuis la loi n° 1.291 de 2004, l’ordre de priorité est le suivant :
1. Monégasques,
2. Personnes nées de parent monégasque, conjoints et ex-conjoints avec enfants,
3. Personnes nées à Monaco et y résidant de longue date,
4. Résidents depuis plus de 40 ans,
5. Anciens occupants sous régimes antérieurs.
Implications pratiques
Pour les propriétaires
- loyers strictement réglementés,
- conditions de bail fixées par arrêté,
- déclaration obligatoire des vacances,
- notification obligatoire de toute cession.
Pour les locataires
- accès sous conditions très strictes,
- logement attribué via un système de priorité étatique,
- forte stabilité locative.
Droit de congé du bailleur
Le bailleur ne peut donner congé que pour :
- démolition en vue d’une reconstruction équivalente,
- surélévation,
- création de nouvelles surfaces habitables,
- travaux indispensables à la salubrité ou à la sécurité.
Évolution récente et raréfaction du parc
La loi n° 1.508 du 2 août 2021, visant la sauvegarde et la reconstruction des logements sous régime protégé, a vu ses principales dispositions annulées par décision du Tribunal Suprême du 12 juillet 2022, certaines contraintes ayant été jugées contraires au droit de propriété.
En conséquence, le parc ancien diminue mécaniquement, au gré des démolitions, le Gouvernement compensant partiellement par la construction de logements domaniaux.
Impact patrimonial et valeur des biens
Un logement sous régime réglementé présente généralement une décote de 10 à 20 % par rapport à un bien équivalent situé dans le secteur libre, en raison :
- de la limitation stricte des loyers,
- des contraintes de mise en location,
- de la restriction du public éligible.
Ces biens conservent toutefois un profil patrimonial défensif, soutenu par la rareté structurelle du logement à Monaco.
Il convient cependant de souligner que cette décote tient également à l’âge des immeubles, à l’absence de prestations contemporaines et au coût élevé des travaux souvent nécessaires, la faible rentabilité freinant mécaniquement les investissements de rénovation.
Droit de préemption
L’ensemble du secteur réglementé est soumis à un droit de préemption au profit de l’État en cas de vente, conformément à l’article 38 de la loi 1.235.
Tableau comparatif synthétique
Élément |
Loi 887 |
Loi 1.235 | ||
Public visé |
Résidents, enfants du pays, Monégasques |
Monégasques | ||
Propriétaires |
Majoritairement privés |
État + privés affectés | ||
Immeubles |
Anciens (pré-1947) |
Logements réservés | ||
Encadrement du loyer |
Partiel |
Strict | ||
Gestion administrative |
Déclaration |
Attribution étatique | ||
Marché |
Semi-libre |
Fermé et social |